Eco Trail Paris 2022 🦖🥇
Si un jour on nous avait dit que nos jambes serviraient à nous déplacer en courant d’un point A à un point B, distant de 80km, que nous l’aurions fait par choix et qu’en plus nous aurions payé pour ça…
Donc oui, nous avons fait nos premiers pas dans le monde de l’ultra, des courses longues, où la marche fait partie intégrante de la course, où bouffer du saucisson au ravito même quand tu es vegan n’est plus un tabou.
Nous nous sommes inscrits au taquet, une minute après l’ouverture, avec un plan d’entrainement finement élaboré. Plan que nous avons suivi très exactement 3 semaines. Mais nous commencons à être habitués.
🦒 La sérénité n’était pas absolue, se lancer dans un ultra en courant au mieux 40 km par semaine, c’est clairement de la folie. Je ne parle pas d’aller taper une perf, juste de pouvoir aller au bout.
Nénmoins l’excitation était bien palpable alors que l’évènement se rapprochait. D’autant plus que la météo s’annonçait clémente, et ça fait une grosse différence. Courir 80km c’est con, courir 80km sous la pluie, c’est très con.
🦩 Le « stress » des grands événements et de ce nouveau challenge, l’excitation était bien là : 30 km de plus que tout ce que j’avais bien pu faire jusqu’à présent, ce n’est pas juste un petit saut de lapinou en avant ! Cependant, je savais que le mental était là et que je voulais aller au bout ! No matter what ! Je n’avais quand même pas bravé le froid, la nuit et la pluie pendant la préparation, pour me laisser abattre par 80 kilomètres !
La véritable aventure commence le vendredi 18/03/2022, lorsque nous préparons nos petites affaires. Un oeil avisé remarquera que, pour ça aussi, notre capacité d’anticipation est à son summum. Surtout quand tu ne trouves plus ton cable de chargeur, et que la montre affiche fièrement 20% de batterie. Mais, nous arrivons tout de même à avoir 30 minutes d’avance sur le planning prévu. Voiture chargée, direction la capitale pour aller récupérer nos dossards.
Mais, Paris c’est un peu un autre DisneyLand pour nous : impensable d’y passer sans y faire une halte shopping et/ou gustative. Et c’est les deux que nous ferrons avant de rejoindre le lieu de retrait des dossards.
Le retrait des dossards se passe normalement, peu de monde, des organisateurs un peu étonnés de voir un 🦩 se présenter au départ du 80km, mais oui, elle a bien l’âge légal. Heureusement qu’elle n’avait pas son k-way décathlon taille 14 ans sur le dos. Faire du sport ça conserve.
🦩 Apparté K-way 14 ans et allure touriste … Je m’améliore, mais sur le départ, je me sens encore un peu comme une touriste. Je ne suis pas en claquettes / chaussettes, mais, les autres sont quand même vraiment bien équipés. Par exemple, tous avaient de beaux sacs d’hydratation hautement étudiés pour un maximum de practicité, de répartition du poids … Je me suis contenté de mon sac marathon de Paris, basique et grignoté par Sofy.
Photo officielle Mais on ne reste jamais très serieux longtemps
Nous finirons la soirée chez des amis, où pour une fois nous serons raisonnables, repas leger, couchés pas trop tard.
La nuit est courte, mais reposante, nous nous réveillons frais et dispos. Le petit dejeuner est vite avalé, nous sommes déjà dans la course. 🦒 Enfin je suis surtout dans la planification du transport jusqu’au point de départ. Faire confiance à la RATP quand on a un horaire à respecter c’est au mieux faire preuve de présomption, au pire, croire encore au père Noël. Surtout quand il s’agit de trouver l’entrée du RER C dans une gare d’Austerlitz en plein travaux (à la base je voulais passer par Chatelet, mais cette station fait peur).
🦩 Ma girafe stresse dans les transports par peur de ne pas arriver à l’heure à cause de tous les aléas et des indications hasardeuses … J’ai muté et suis devenue résistante : je cumule toujours 15 000 pannes-annulations-retards-pertes-déroutages-crevaisons pour chaque voyage, nous ferons donc appel à ce sang froid acquis pour les prochains voyages 😅
L’arrivée sur site se passe bien, avec un petit trajet en bus, 🦒 mes années collège nous oblige à aller nous assoir tout au fond, la place des thugs, et accessoirement la seule place qui me laisse suffisament de place pour caser mes jambes. Il ne s’agirait pas de se faire un claquage 1 heure avant de partir. Notre départ est à 11h, mais on nous demande d’être présents sur site à partir de 10h. Avec le recul, il n’y a eu aucun contrôle de notre dossard, ni de notre horaire de passage, on serait partis dans une autre vague celà n’aurait posé aucun problème. Mais, nous avions décidé de partir dans les premières vagues, car nous savions que la course allait être longue, et profiter du maximum de jour possible faisait partie de notre stratégie de course, oui oui une STRA TE GIE, et le pire, c’est que nous l’avons presque respéctée.
La stratégie de la win :
Le profil de cet Eco Trail est assez plat, à peine 2000m de D+ sur 80km, il n’y a aucune difficulté majeure, mais c’est aussi pour ça que c’est un parcours difficile. Jusqu’au premier ravito des 25 km, c’est très roulant et il est facile d’aller cramer ses premières cartouches dans trop de vitesse. Nous nous sommes imposés un mode Cyrano avec une alternance de 14 minutes de course pour 1 minute de marche lente.
🦩 LENTE ?! Pas pour tout le monde 😅 J’ai dû rappeler 🦒 à l’ordre plus d’une fois : quand il fait un 1 pas lent, je dois en faire 3 rapides pour tenir le rythme 😅
Marcher dans les montées (même si on était en phase de course), courir dans les descentes (les faciles). Nous avons progressivement réduit les phases de course et augmenté les phases de marche avec l’augmentation des kilomètres.
La préparation de la loose :
🦒 Et c’est là que ma préparation va faire des miracles. Quand ton volume hebdomadaire ne dépasse guère les 40km, le mur arrive généralement vers les 30km. Et ça n’a pas loupé, à 30 bornes je n’avais plus de jambes, et là , le mental fait un calcul simple et rapide. Tu es cuit et il te reste encore 50 bornes à te taper.
Je ne vous cache pas qu’entre le 30eme et le 40eme, je cherchais plus d’excuses pour arrêter que pour continuer.
Le truc qui m’a fait tenir… Mon 🦩. Quand je suis dans le mal, malheureusement rien d’autre que moi même ne peut m’aider. Les encouragements ont un effet inverse. Elle a donc été patiente, et présente, j’ai ralé (mais moins que d’habitude quand même). Elle m’a conseillé de manger, je l’ai écouté et j’ai progressivement passé le cap. Je savais que si j’arrêtais, elle s’arrêterait aussi, et je ne pouvais pas la priver de notre premier ultra.
🦩 Moi, je ne voulais en AUCUN cas arrêter !
Sur ce passage à blanc de son Dino : Ce n’est plus notre première sortie ensemble ni même notre première course officielle ensemble. J’ai appris à la connaître. Je sais donc que dans ces moments, il faut juste que je fasse profil bas. Pour deux raisons :
1) Quoi que je dise, rien ne peut le faire changer d’avis ou le remotiver.
2) Il est cash et répond sèchement dans ces moments … Du coup, je suis triste, du coup, je suis énervée et vexée, du coup, je perds moi aussi le mental, du coup, ….
Bref, j’attends que ça passe ! 😅
Entre le 40 et le 60 tout rentre dans l’ordre, les andorphines font le job, courir dans la nature avec le beau soleil aussi. Forêts, étangs, passages dans des zones civilisées, le parcours est super agréable, vallonné avec des bons raidillons mais techniquement « facile ». Le plus dur c’est de lever les pieds avec la fatigue pour ne pas taper dans une racine ou un caillou pour aller se ramasser 2 mètres plus loin. De ce fait, nous redoublons de vigilance dans les descentes où nous décidons de ne plus courir, surtout que le soleil se couche : obscurité et fatigue ne sont pas compatibles quand la prudence est de mise. Le ravito du 55eme sera une orgie de compote et de fruits secs. 🦒 ET d’un coca biiien attendu. Ce ravito sera, avec l’arrivée, notre meilleur moment sur cette course.
🦩 Vous vous souvenez de se sentiment d’être une touriste, Eh, bien je l’ai eu encore plus à partir du 49ème kilomètre : ma fermeture éclair s’est fait la malle ! J’ai tenté de refermer le tout à l’aide de deux des quatre épingles à nourrices qui tenaient mon dossard en place. Ca donne un petit air rebel non ? Le petit coiffé/décoiffé du trail voyez-vous ? Bon, j’ai à peine courru 200 mètres avant que les épingles déclarent elles-aussi forfait. J’ai donc juste tout tassé au fond de mon sac et ai courru les 30 kilomètres restants sac ouvert ! J’ai aussi dû répondre à autant de coureurs, que « oui, merci beaucoup de me prévenir que mon sac est ouvert, mais il est cassé ». La bienveillance est présente sur ce type de course !
Le mental tient, le physique ne suit plus :
Au 70eme km les douleurs sont omniprésentes, nous sommes officiellement détruits, courir fait mal, marcher fait mal aussi, la nuit est définitevement tombée et nous déambulons tous à la queue leuleu comme des zombies à la lueur de nos lampes frontales. Nous touchons au premier but. La dernière montée avant le dernier ravito. C’est là que nous savons que l’aventure est gagnée, il reste 10 kilomètres, que du plat sur les quais de Seine avant de rejoindre la tour Eiffel, et le timing est bon, nous savons que nous irons au bout sans craindre les barrières horaires. Ce qu’on ne savait pas encore c’est qu’au 73eme courir ne serait même plus une option, nous n’y arriverons plus.
🦩 Deux ampoules par orteil : j’avais limite peur que la Tour Eiffel soit jalouse de moi ! 💡
Le froid se fait plus mordant, chaque pas est un combat, sur un parcours parfois bucolique en longeant les péniches, parfois urbain-glauque quand ce n’est plus qu’un trottoir au bord de la route. Mais au détour du Parc de l’Ile Saint Germain, elle est là , flamboyante, elle nous attend dans sa robe de lumière. Elle nous guide de son faisceau lumineux.
La dame de fer :
326 marches, que nous gravissons presque avec facilité, des métronomes, marche par marche au son du speaker qui annonce les arrivées des participants devant nous.
Une immense fiérté. 🦒 En écrivant ces lignes j’en ai encore les larmes qui montent.
🦩 J’ai les larmes au yeux. J’ai envie de pleurer. Mon Dino me dit qu’il a envie de « chialer ». Je lui dis que moi aussi. Je m’approche pour lui faire un bisou. Les larmes arrivent. Attention, l’une d’elles commence à s’échapper, ouille, si elle se mettent toutes à sortir je vais être une fontaine humaine ! De joie. De soulagement. De bonheur d’être arrivés ensemble au bout de cet effort.
C’est à ce moment qu’il aperçoit le ravito et décide de bouger. Je cache ma larmouille. Il n’aura rien vu. Il le lira. J’ai caché ces larmes mais elle reviennent en écrivant ce passage ! Courir c’est chouette. Le trail c’est dur. Ce premier ultra trail a été une épreuve. Le courir ensemble, le terminer ensemble : j’en suis incroyablement reconnaissante.
Les « Je t’aime meuf » du parcours m’ont vraiment été précieux. Surtout après ses 10 kilomètres de coup de mou ! 😅
Nous repartons et allons nous assoir au premier étage de cette grande dame de 330 mètres. Girafe déguste son breuvage houblonné. Moi 🦩 je gèle, moi 🦒 aussi ! Nous décidons de remettre nos leggings. J’ôte mes chaussures …. HAHAHA ! Fâcheuse erreur petite ! Impossibilité totale de les remettre : entre les doigts gelés et les pieds qui ont triplé de taille : c’est une épreuve à part entière (pire que les chaussures de ski !)
On se dirige vers les ascenseurs … Fainéants ! Oui, je vous entends vous égosiller au fond de votre canapé : « 80 km et même pas capable de redescendre les marches ». Alors en effet, habituellement nous sommes partisans de l’effort mais là … honnêtement … je crois que s’il n’y avait pas eu l’option ascenseur j’aurais descendu en rappel, en mode flamant unijambiste Arthrosé et adepte du Pôle DANCE !
J’ai souffert des adducteurs sur près de 20 km, je crois que le gauche est resté sur la chaise au 1er étage de la Tour Eiffel. Si jamais vous aller y faire un tour, saluez-le de ma part 😅
Avant de prendre l’ascenseur, je tremblais comme de la jelly Anglaise. Ma 🦒 m’a adoubée avec la Sainté couverture de survie et c’est telle une papillote de chocolat blanc que j’ai terminé l’aventure 😎
Nous sommes « finnisseurs » de notre premier ultra, pas les « performeurs », nous sommes le ventre mou du classement, la deuxième partie du tableau, ceux qui se donnent du mal dans leurs quotidiens pour vivre et allez au bout de leurs rêves. Réaliser ce genre d’effort demande des sacrifices, et même si aujourd’hui nous nous demandons pourquoi nous nous faisons autant de mal, nous sommes encore prêts à nous sacrifier…